Poèmes en vrac

LA VIOLETTE (d’après J. W. von Goethe)

(Extrait de Capharnaüm © Troubadour 1986)

978-3-924343-05-7

Un jour, une violette,

Un amour de fleurette,

  Cachée dans un grand champ,

  Vit passer une enfant,

  Et entendit son chant :

  Une jeune bergère,

  À démarche légère,

  Et de charmante humeur ;

  Elle aperçut la fleur.

  Celle-ci, presqu’en pleurs,

  Dit en ployant la tige :

  « Ah, mon Dieu, que ne suis-je

  La plus belle des fleurs !

  Rien qu’un petit instant,

  Pour que la belle enfant

  Me cueille et me dépose

  Là sur sa gorge rose.

  Hélas ! Rien qu’un instant !

  Elle m’aimerait tant ! »

  Mais voilà que la fille

  Arracha la brindille,

  Sur sa gorge la prit…

  La violette meurtrie

  Lentement se pâma

  Et, se mourant, pensa :

  « Aujourd’hui ou demain,

  Que m’importe la mort,

  Lorsque c’est par sa main,

  Je suis heureuse encor ! »

                   Traduction : Ores

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Comme après la pluie (d’après Franz Werfel) 

(Extrait de Dramma giocoso © Troubadour 2018)

978-3-924343-43-8

Me voici comme, après la pluie,

Le vaste parc, là, devant l’huis…

Certes le vent a séché l’air,

Mais fleurs et feuilles rivalisent

D’éclats irisés et reluisent

En gouttes de diamants solaires.

Mon cœur déborde de rosée

Et de verts feuillages vernis

Car tantôt, amour, je te vis.

Aussi voudrais-je aller puiser

En mon âme un vaste jardin

Puis y flâner vers mon destin.

Traduction : Lepalestel

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Je dis ton nom (d’après Franz Werfel) 

(Extrait de Dramma giocoso © Troubadour 2018)

978-3-924343-43-8

Après les chevauchées, après les randonnées

Qui par monts m’ont conduit et par vaux m’ont mené,

Dans mon antre, voilà, je suis bien de retour,

Et bien sûr tout est là, à jamais, pour toujours.

À mon bon souvenir, là, ton nom se rappelle,

Belle enfant, or ce nom n’a plus rien de réel…

Alors je viens enfouir mon visage consumé

Dans les plis de ce nom, comme à l’accoutumée…

Traduction : Lepalestel

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Après un orage (d’après Friedrich Klopstock) 

(Extrait de Dramma giocoso © Troubadour 2018)

978-3-924343-43-8

   Déjà chuintant des cieux, déjà chuintant des champs,

La chaleureuse pluie insuffle son doux chant…

Elle étanche nos soifs et dispense à la terre

Les célestes bienfaits dont regorge l’éther.

Vois comme le Très Haut la foudre a épuisé,

Il vient plein de douceur, parsemer de rosée

L’arc-en-ciel de la paix

Se dressant sous son dais.

Traduction : Lepalestel

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Contre son gré, contre le nôtre !

(Chanson dédiée à Samuel Paty) 

Tu es parti

Contre ton gré, contre le nôtre !

La lumière en pâtit

Marianne perd un apôtre

Par l’Hydre aux mille têtes

L’obscurité s’est faite.

On n’l’a pas protégé

Qui clamait « Liberté ! »

Lui, le héros piégé

En fut décapité.

*

Tu es parti

Contre ton gré, contre le nôtre !

La lumière en pâtit

Pourquoi se lamenter ?

Larme n’est point vertu

A quoi bon reporter

Face à des fous obtus ?

*

Ressaisis-toi, Marianne,

Inspire-toi de Jeanne,

Arc-boute-toi et impose

Aux barbares une clause.

*

Ravive les Lumières

D’un Grand Siècle si fier

Inspire l’empathie

A ceux qui tuent Charlie.

*

Tu es parti

Contre ton gré, contre le nôtre !

La lumière en pâtit

Mais elle va revenir

Car nous saurons tenir.

Vincent Lepalestel